Production

« Certaines musiques actuelles peuvent se vivre en salle assise » (A. Vanden Born, Forum de Vauréal)

Par Thomas Corlin | Le | Diffusion, booking

Le Forum de Vauréal, salle de musiques actuelles proche de Cergy, en Île-de-France, compose avec les contraintes sanitaires et met sur pied une programmation assise éphémère, en l’attente de nouvelles normes sanitaires. Sa directrice Aurélie Vanden Born explique la démarche.

Le groupe Lofofora en concert au Forum de Vauréal.  - © D.R.
Le groupe Lofofora en concert au Forum de Vauréal. - © D.R.

Comment le Forum Vauréal a-t-il réagi à la crise sanitaire au printemps dernier ?

Nous avons reporté quinze concerts qui devaient se tenir de mars à juin. Ils sont désormais étalés jusqu’à début 2021. Nous n’avons annulé qu’une seule date : il s’agissait d’une tournée complexe du point de vue logistique, qui n’a pas pu être reconduite. 

Notre structure est un EPIC, et compte cinq fonctionnaires d’État et trois salariés de droit privé. Ces derniers ont été placés en chômage partiel sur mai et juin. 

L’occasion de travailler sur une émission mensuelle à diffuser sur notre webTV et nos réseaux. Il s’agit de 30 minutes de live et 30 minutes d’entretien avec un groupe qui a une histoire forte avec le lieu. Nous avons voulu éviter d’ajouter un autre livestream à l’offre abondante que le confinement avait générée.

Nous ne disposons pas vraiment d’extérieur actuellement, notre parvis étant occupé par les travaux du lycée voisin. Nous avons donc organisé quelques événements hors les murs, dont une journée de concerts de rue à Cergy Préfecture, un concert de jazz sur le toit de l’office du tourisme de Pontoise, et un autre qui fut annulé en dernière minute, comme d’autres événements dans la région. 

Cela a aussi été l’occasion de travailler sur une émission mensuelle à diffuser sur notre webTV et nos réseaux. Il s’agit de 30 minutes de live et 30 minutes d’entretien avec un groupe qui a une histoire forte avec le lieu, le tout enregistré et monté - le projet sera bientôt annoncé. Nous avons voulu éviter d’ajouter un autre livestream à l’offre abondante que le confinement avait généré.

Nos trois studios de répétition ne rouvriront que la semaine prochaine. Quant aux résidences, elles se sont fait très rares, puisqu’elles précédent normalement des dates de tournée, actuellement impossibles à poser. 

Enfin, nos actions scolaires se sont recentrées sur des établissements très locaux, puisque les élèves n’ont plus le droit de se déplacer en bus lors de leurs sorties. Autant dans le choix des artistes que nous pouvons faire jouer ou dans les autres activités du lieu, notre action se resserre sur la proximité. 

La rentrée ne permet toujours pas d’événements debout en lieux clos et empêche ainsi la majorité des concerts d’avoir lieu. Vous tentez néanmoins une programmation « assise », comment se déploie-t-elle ?

L’ADN d’une salle de musiques actuelles est et demeure de faire des concerts debout. Nous ne sommes ni une scène nationale ni un centre culturel, nous vivons en partie des recettes du bar. Notre salle programme notamment du métal, où il existe une forte interaction entre la scène et le public avec des gens qui montent sur scène, etc. 

Nous avons programmé des groupes émergents locaux ou à rayonnement national. Il s’agira de jazz, de rock progressif, de chanson - des esthétiques qui peuvent s’accommoder d’un public assis.

Malgré tout, certaines musiques peuvent éventuellement se vivre en configuration assise, et c’est ce que nous allons tester avec une programmation de concerts à 60 places assises. Cela correspond à la moitié de notre jauge assise normale de 120, dont nous sommes actuellement privés puisque Cergy se trouve en zone rouge.

Ainsi, nous avons de nouveau reporté la plupart des concerts reprogrammés cet automne, à l’exception de celui de la chanteuse Dani, qui pourrait se maintenir en assis si elle l’accepte. Nous en avons programmé d’autres, à savoir des groupes émergents locaux, ou à rayonnement national. Il s’agira de jazz, de rock progressif, de chanson, des esthétiques qui peuvent s’accommoder d’un public assis. 

Il s’agira de deux événements par semaine, à des horaires d’afterwork. L’un sera gratuit et présentera des groupes participant à des programmes d’accompagnement du Studio des Variétés ou du conservatoire, avec lesquels nous collaborons. L’autre accueillera des groupes plus visibles au niveau national, certains en acoustique, à 5 € en tarif unique. Ces événements seront retransmis en direct, avec un équipement de captation vidéo de qualité. Ils seront lancés le 10 septembre par une première soirée sans concert qui prendra la forme d’une rencontre avec l’équipe, pour marquer la rentrée et connaître le ressenti de notre public. 

Ces événements étant gratuits ou à tarif réduit, comment gérez-vous les finances du lieu pour cette rentrée ?

Aurélie Vanden Born directrice artistique Forum Vauréal - © D.R.
Aurélie Vanden Born directrice artistique Forum Vauréal - © D.R.

J’ai improvisé cette programmation assise sans prendre en compte l’aspect économique. Le Forum n’a pas encore faire de demande d’aides. Je considère que d’autres lieux sont probablement plus dans l’urgence que le nôtre, nous verrons plus tard. Notre bilan économique 2020 parviendra sans doute à s’équilibrer. Nous sommes certes déficitaires sur les concerts, mais nous n’avons pas engendré de dépenses. Mes inquiétudes portent davantage sur 2021 et 2022, concernant la reconduction des subventions. 

Notre billetterie fonctionne normalement sur une économie réelle et propose des places entre 7 et 22 €. Nous avons choisi une tarification différente pour ces événements afin d’attirer le public vers les artistes émergents, ce qui n’est pas évident, même en temps normal. Il était aussi important de payer les artistes, à raison d’un cachet par artiste ou technicien a minima. 

Après cette programmation spéciale en septembre, nous agirons en fonction des annonces pour le reste de la saison, et reviendrons peut-être à une programmation normale. Actuellement, travailler dans une salle de concert ou tout lieu de spectacle vivant, c’est agir en réfléchissant, et réfléchir en agissant.