Participatif : en Seine-Saint-Denis, des Veilleurs de ville se relaient dans un abri architectural
Par Thomas Corlin | Le | Plein air
Pour la Nuit Blanche du 2 octobre 2021, Joanne Leighton lance son projet de Cycles de Veilleurs dans le Parc Jean Moulin à Montreuil (Seine-Saint-Denis), où des particuliers se succèderont pendant un an sur deux veilles quotidiennes de la ville. Le dispositif, simple et participatif, est une des rares pièces qui a pu se maintenir à travers la crise, d’après la chorégraphe australienne Joanne Leighton.
En quoi consiste la mission des Veilleurs ?
Chaque jour, au lever et au coucher du soleil, pendant une heure, une personne observe la ville, debout, depuis un objet architectural conçu comme un abri pour l’occasion et installé sur un panorama. Cette fois-ci, cette boîte est posée sur le toit de la maison du parc Jean Moulin, entre Bagnolet et Montreuil. L’expérience se mène seul, sans téléphone portable, en position debout. Un accompagnateur présente les lieux au veilleur 30 minutes avant chaque veille. La performance a lieu tous les jours sur un cycle d’un an.
Un portrait du veilleur et de ses alentours est fait par l’accompagnateur. Il est aussi demandé que le veilleur écrive quelques lignes sur leur expérience. Nous entendons à la fois créer un rituel et une forme de communauté.
Comment se passe le recrutement ?
Le projet a été jugé « safe » tout au long de la crise.
La participation est libre et gratuite, à partir de 16 ans (avec autorisation parentale jusqu’à 18 ans). Généralement, les gens entendent parler du projet en ligne, puis suivent un atelier de préparation pour comprendre son cadre, l’état d’esprit dans lequel il est mené, notamment avec d’anciens participants. Les inscriptions se font sur un agenda en ligne. Nous cherchons à sensibiliser les gens à ce qu’est une ville, comment nous y vivons, ce qu’il est possible d’y faire de nouveau, sur le temps long notamment.
Existe-t-il d’autres événements autour du cycle ?
Je dirige une compagnie de danse qui intervient lors d’événements autour du projet, dont un est prévu pour la Nuit Blanche à Paris, ou lors de « dance walks », ces trajectoires dansées, organisées dans certaines villes. Il existe aussi des moments de rencontre entre veilleurs et danseurs, pour réfléchir à la présence et la fonction de ces veilles, avec un temps de parole harmonieux. Il arrive aussi que des personnalités médiatiques participent au cycle, comme c’est le cas de la boxeuse Sarah Ourahmoune qui inaugure le cycle du Parc Jean Moulin.
Depuis combien de temps le projet existe-t-il et comment a-t-il traversé la pandémie ?
Cela fait dix ans que nous menons des cycles de veille dans plusieurs pays. Actuellement, il s’en tient aussi à Hull au Royaume-Uni et à Munich en Allemagne, et le prochain cycle en France aura lieu à Belfort (Territoire de Belfort).
C’est le seul de mes projets artistiques qui a été maintenu tout au long de la crise. En 2020, les veilles de Gratz en Autriche n’ont pas été interrompues et le cycle de Munich, débuté en pleine crise, n’a pas été annulé. Du fait de son dispositif très simple, avec un participant unique, il a été jugé « safe », et je suppose que son caractère très doux de « veille sur l’humanité » faisait sens dans le contexte.
Quels moyens le projet mobilise-t-il ?
Il s’agit principalement de la construction du point de veille, assurée à chaque fois par Benjamin Tovo. Pour le Parc Jean Moulin, les financements proviennent de la Maison Pop (qui encadre entièrement le projet, du recrutement à l’accompagnement des veilleurs), de la Région, de la DGAC, de la Ville de Montreuil, de Paris Réseau Danse, du département et de la Nuit Blanche pour son lancement. Ce cycle est lancé dans le cadre du programme culturel des JO de 2024, mais rien n’est pour le moment officialisé et nous ne disposons pas encore d’aides spécifiques à ce titre.