Ventes, finances

Mécénat : le Château de Chantilly adopte le financement participatif pour sa bibliothèque

Par Sylvain Chantal | Le | Subventions, mécénat, aides

200 000 euros, c’est le montant visé par le Château de Chantilly pour l’opération de mécénat participatif “J’adopte un livre”. Lancée le 28 septembre 2022, cette campagne a pour but de financer le dépoussiérage et la restauration des reliures du Cabinet des livres, puis d’en permettre la valorisation numérique. Mathieu Deldicque, directeur du musée de Condé de Chantilly, revient sur le principe de cette “adoption” originale.

Château de Chantilly - © Jebulon
Château de Chantilly - © Jebulon

Ouvert depuis 1897, le Cabinet des livres du Château de Chantilly recèle 14 000 volumes, datés de la fin du 10e siècle au début du 19e siècle, dont près d’un millier nécessitent une restauration. Pour financer cette opération, l’institution a mis en place une campagne de mécénat participatif baptisée “J’adopte un livre”.

« Nous avions déjà lancé des opérations de ce genre pour l’adoption des bancs du parc et des arbres. Mais c’est la première qui concerne l’aspect culturel, explique Mathieu Deldicque, directeur du musée de Condé de Chantilly depuis le 17 juillet 2022. Concrètement, on se rend sur le site internet du Château de Chantilly où une page dédiée a été créée à la rubrique mécénat. Soit on adopte un livre avec un montant libre, soit on y participe avec un montant indiqué qui correspond à un type de restauration. À partir de 1 000 euros, on peut choisir son livre. On adresse un mail et on est mis en relation avec notre département mécénat et la conservation de la bibliothèque. Pour les livres les plus précieux, c’est-à-dire les grands manuscrits, c’est plutôt autour de 3 500 euros que les opérations se déroulent. Des contreparties sont prévues, dont l’inscription du donateur sur le catalogue de l’inventaire. Il y en a pour toutes les bourses car on peut participer en ne mettant que 5 euros. »

« Avec 200 000 euros, nous arriverons à restaurer la majorité des reliures »

Mathieu Deldicque - © D.R.
Mathieu Deldicque - © D.R.

La campagne de restauration, qui a débuté, comprend plusieurs volets : le dépoussiérage et le désencrassage des reliures, la restauration des reliures fragilisées au fil du temps et susceptibles de se dégrader encore, et la restauration des manuscrits et des ouvrages les plus remarquables de manière à en permettre la valorisation numérique. « Avec l’équipe de la bibliothèque, nous avons essayé de choisir les reliures les plus abîmées, celles qui doivent être bichonnées, celles où il faut décrasser des pellicules. La bibliothèque n’a pas été beaucoup restaurée ces dernières décennies. Nous visons 200 000 euros en quatre ans. Avec cette somme, nous arriverons à restaurer la majorité des reliures. »

Depuis le lancement de la campagne, l’institution a reçu plus de 10 000 euros et quelques propositions originales, comme celle émanant d’une classe du sud de la France. « Des élèves ont constitué une tirelire et veulent adopter un livre en tant que classe. Cela rentre dans un projet pédagogique. On sera en relation avec cette classe pour parler des entreprises de restauration, présenter des livres, faire des conférences à distance… Au-delà du projet de restauration, c’est aussi cela, le but de “J’adopte un livre” : que chacun puisse se sentir investi et en quelque sorte propriétaire de ce patrimoine commun qu’est la bibliothèque du Château de Chantilly », raconte Mathieu Deldicque. 

« Le temps est avec nous »

Pour cette campagne, l’institution n’a pas souhaité passer par une plateforme spécialisée dans le mécénat participatif. « Elle s’effectue sur notre site internet et la promotion est assurée par nos moyens de communication : nos services de communication et de mécénat, nos agences de relations presse, nos réseaux sociaux, le réseau des fidèles qui entourent Chantilly et les cercles d’amis. Le temps est avec nous. Nous ne sommes pas à trois mois près. Nous effectuerons des relances régulières pour mettre en lumière cette opération qui permet aussi de parler des métiers des musées, des restaurateurs, de tous ces métiers d’art au service des collections patrimoniales. »

La deuxième étape consistera à numériser les œuvres. « Une grande majorité des manuscrits a été anciennement numérisée par le CNRS. Mais très peu d’imprimés l’ont été. C’est le deuxième étage de la fusée. Une fois restaurés, nous pourrons numériser ces livres plus facilement et sans dommage. Nous sommes en lien avec l’Institut de France qui a créé une bibliothèque numérique dans laquelle Chantilly a toute sa place. »