Production

Plateformes : À 2 Pas de la Scène intègre la participation citoyenne au spectacle vivant

Par Thomas Corlin | Le | Diffusion, booking

Lancé en 2016, le site À 2 Pas de la Scène réunit spectateurs, artistes et lieux d’accueil pour organiser des événements culturels sans intermédiaires, dont les coûts et besoins sont calculés par l’interface. La plateforme entend bientôt passer de sa phase d’analyse à sa phase commerciale, d’après son fondateur Nicolas Bienvenu, issu de l'économie sociale et solidaire.

La plateforme a aidé à organiser une douzaine d'événements. - © D.R.
La plateforme a aidé à organiser une douzaine d'événements. - © D.R.

Comment la plateforme fonctionne-t-elle ? 

Nous avons organisé une douzaine d'événements pour l’instant, pour la plupart musicaux, qui ont concerné près de 10 000 personnes.

Nous référençons des artistes et des lieux de spectacles. À titre d’exemple, aujourd’hui, près de 200 artistes sont inscrits. Ensuite, le spectateur peut composer la programmation d’un événement et pré-acheter un billet. À partir d’un certain nombre de spectateurs, et selon le coût d’organisation de la date tel qu’il a été calculé par la plateforme, le spectacle se déclenche. 

Juridiquement, À 2 Pas de la Scène dispose d’une licence spectacle, et elle est affiliée au Centre National de la Musique. Les organisateurs sans licence qui passent par la plateforme peuvent organiser jusqu'à six événements par an. Nous travaillons actuellement avec la Drac et la Sacem.

Combien d'événements ont-ils été organisés par À 2 Pas de la Scène, et sur quels territoires ? 

Nous avons organisé une douzaine d'événements pour l’instant, pour la plupart musicaux, qui ont concerné près de 10 000 personnes cumulées, en comptant les organisateurs, les artistes et le public. Les premiers événements ont eu lieu dans des salles de spectacle très installées, telles que Victoire2 à Montpellier (Hérault) ou la Coopérative de Mai à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), mais, même si nous aimons travailler avec ces lieux, ce n’est pas le message que nous voulions envoyer. L’action de la plateforme se situe plutôt dans un réseau de tiers lieux, de bars insolites, de lieux patrimoniaux ou encore de sociétés coopératives comme l'Éveilleur à Avignon (Vaucluse). 

Nous avons organisé des événements en Région Occitanie, étant nous-mêmes basés à Toulouse (Haute-Garonne), mais aussi en Lozère, dans le Cantal, dans les Hautes-Alpes, etc. En Charente-Maritime, le Surf Club d’Oléron a organisé un événement pour sensibiliser aux problématiques de l’océan : ils avaient le lieu, et ils ont utilisé la plateforme pour que leur communauté programme et finance elle-même l'événement. 

Concernant les événements à venir, le 20 novembre 2021, nous cherchons un lieu dans notre région pour programmer une journée qui mettra en avant les pratiques participatives en culture, avec une après-midi pédagogique et une soirée festive. Puis, du 14 au 18 février 2022, nous participerons à l’organisation du festival Game Of Trees dans les Hautes-Alpes. 

Avec quels financements et sur quel business model fonctionne la plateforme ? 

Il faut redorer le blason du participatif.

Nous nous sommes lancés avec une subvention « numérique et innovation » de la Région Occitanie, puis avons contracté un prêt auprès d’une banque, et investi nos propres fonds. Nous souhaitons établir une stratégie plus commerciale et marketing pour développer la plateforme. Les artistes s’inscriront gratuitement, mais les lieux pourraient bénéficier de quelques événements tests gratuits sur la plateforme avant de payer une adhésion, même minime. Nous envisageons peut-être une commission. 

Quels développements envisagez-vous ? 

La plateforme ne peut pas fonctionner indépendamment, il faut au moins 50 % d’humain pour que les choses se lancent, le numérique ne se suffit pas à soi-même. Nous avons donc un lourd travail pédagogique à mener, pratiquement de la formation. Il faut aussi redorer le blason du « participatif ». Le terme a été galvaudé, et il est surtout synonyme de crowdfunding pour des projets qui n’aboutissent pas toujours, ou qui sont récupérés politiquement. Le secteur culturel est encore méfiant par endroits : même si dans les institutions et les tutelles, certains sont convaincus que les choses vont se transformer, pour la plupart, le numérique représente encore une menace pour les emplois, et les démarches participatives sont jugées avec une certaine condescendance. Pourtant, nous avons besoin de la coopération de tout le secteur pour que ce type de projet aboutisse. 

La plateforme a principalement encadré jusque là des événements musicaux, mais nous entendons nous diversifier. Le secteur théâtral est très intéressé par ce mode de programmation, nous l’avons remarqué au fil de nos échanges à Avignon cette année.