Production

Écoresponsabilité : Récupscène, « Le Bon Coin » du spectacle vivant

Par Thomas Corlin | Le | Éco-responsabilité

À l’heure où le spectacle doit se mettre au vert, Recupscène propose une plateforme de revente de matériel de scène entre professionnels. Lancé en 2018, le projet entend se développer grâce aux soutiens à l’écoresponsabilité, d’après son cofondateur Marc Burlot.

Projecteurs ou « tournettes » font partie des éléments revendus sur la plateforme. - © D.R.
Projecteurs ou « tournettes » font partie des éléments revendus sur la plateforme. - © D.R.

Quel est le champ d’action de Récupscène ? 

Nous le présentons comme « Le Bon Coin » des arts de la scène. C’est une plateforme gratuite où des professionnels mettent en vente du matériel déjà utilisé dont ils cherchent à se débarrasser, au lieu de le mettre à la poubelle ou de le stocker. C’est de la pure mise en relation, le site ne touche aucune commission sur les ventes et les membres choisissent leurs propres prix. Nous ne proposons pas de solution de transports ou de livraison, même si nous avons un temps conclu un partenariat avec Cocolis, auxquels nos membres ont peu adhéré. 

Pour exemple, les projecteurs deviennent rapidement obsolètes et les directeurs techniques les changent régulièrement. Or, même usagés, certains peuvent intéresser des jeunes compagnies qui n’ont pas les moyens de s’en acheter des neufs, et c’est là qu’intervient notre site. 

Certains éléments ont du mal à se vendre en un seul bloc. La Comédie Française veut par exemple se débarrasser d’un décor, mais personne n’ira le chercher en une seule pièce, nous faisons dans ce cas là appel à des partenaires pour en faire la collecte. 

Le passage à l’éco-construction nécessitera une vraie incitation politique.

En revanche, nous ne pouvons pas nous substituer à une politique publique plus incitative en matière d’éco-construction dans le spectacle vivant. Construire avec des matières recyclées, cela coûte 30 % de plus qu’avec du neuf parce que le traitement des matières nécessite des compétences et du temps. Ainsi, seule une subvention à l’éco-construction de décors pourra faire la différence. 

Combien d’utilisateurs comptez-vous et qui sont-ils en général ? 

Nous recensons 2 000 utilisateurs. Ce sont principalement des régisseurs et directeurs techniques de lieux même s’il est aussi possible de s’inscrire en temps que particulier - ce qui est extrêmement rare d’après nos observations. Les descriptions des annonces sont très détaillées, seulement des professionnels ont accès à ce niveau de précision technique.

Enfin, 3 à 4 % des annonces sont des commerçants qui vendent du neuf, ce qui n’est pas l’objectif du site, mais nous ne pouvons pas vraiment l’empêcher, du moins en l’état. Nous remarquons par ailleurs que des mairies s’inscrivent sur notre site, à notre surprise. 

Le site a participé à un appel à projets public.  - © D.R.
Le site a participé à un appel à projets public. - © D.R.

Travaillez-vous en partenariat avec des recycleries ?

Artstock collabore avec nous. Ils vendent du matériel sur notre plateforme et traitent certains éléments mis en vente par d’autres. D’autres structures de ce type ne souhaitent pas collaborer avec nous au motif que nous serions concurrents ou pas compatibles avec leur activité, ce que nous regrettons. 

Comment s’est lancé ce site et quel développement projetez-vous ?

Je suis comédien dans une compagnie, la Part des Anges, qui présente bientôt une création à la Colline (Paris 20e). Ma rencontre avec le directeur technique de cette compagnie (qui officie désormais à la scène nationale de Cergy Pontoise) a concrétisé cette idée d’un site qui permettrait de revendre du matériel déjà utilisé. Nous l’avons lancé rapidement, avec nos propres moyens, sans protection ni législation, sous une forme associative, pour voir s’il susciterait de l’intérêt.

Jusqu’à maintenant, le projet est tenu par nous sur notre temps libre. Il tourne plus ou moins tout seul, mais nous réfléchissons à un fonctionnement freemium qui nous permettrait au moins de financer le nom de domaine. 

Nous sommes ensuite passés par deux incubateurs. Tout d’abord, la coopérative Mu nous a appris beaucoup de choses et permis de faire des ateliers, puis Audiens nous a donné de la visibilité. 

Nous réfléchissons désormais à développer le marketing, les partenariats, la modération et le site, mais il nous faudrait embaucher quelqu’un à plein temps à ce titre. Jusqu’à maintenant, nous n’avons pas fait de demande de subvention, mais nous allons nous y mettre. France Relance a lancé plusieurs appels à projets pour accompagner la transition numérique et écologique, notamment dans la culture, et nous y candidatons.