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Numérique : Aria, une voix familière pour s’initier à l’opéra

Par Thomas Corlin | Le | Médiation

Pendant le premier confinement, l’Opéra de Paris (9e) a lancé Aria, une web-app conversationnelle pour faire découvrir l’univers lyrique. La cheffe de projet Caroline Brown décrit le déploiement enthousiasmant de cet outil de médiation sur mesure, avec les précisions de la responsable digitale Gwenola Taithe.

La web-app  - © D.R.
La web-app - © D.R.

Quelle est la forme de l’application Aria que vous avez lancée pendant le premier confinement ? 

Caroline Brown : C’est une web-app, c’est-à-dire qu’il n’est pas nécessaire de la télécharger sur un « store ». Il était important de supprimer cette barrière du téléchargement car nous voulions être le plus accessible possible. Le support de la web-app permet une grande fluidité dans l’animation, et se consulte sur tablette comme sur téléphone. Ce que nous visons, c’est un usage nomade, celui des micro-moments comme les temps de transport, où l’on consulte Instagram pour passer le temps. L’objectif est de trouver un nouvel outil de médiation culturelle auprès d’un public qui ne s’intéresse a priori pas du tout à l’opéra, et qui aurait entre 25 et 35 ans, puisque la questions du renouvellement du public de l’opéra est cruciale. 

Un nouvel outil de médiation culturelle auprès d’un public qui ne s’intéresse a priori pas du tout à l’opéra, et qui aurait entre 25 et 35 ans.

Aria se présente comme un parcours ludique qui fait des liens thématiques entre pop culture et opéra. Un bot parle à l’utilisateur sur un ton décalé, l’interpelle, et l’accompagne dans sa découverte. Des ponts sont faits entre Wagner et Star Wars, le rugby et Carmen (l’hymne de l'équipe de Munster en Irlande en est extrait), la musique électronique et l’opéra, etc. Pour l’instant, Aria propose 300 contenus, que nous actualisons constamment - les nouveautés sont d’ailleurs vite plébiscitées par les utilisateurs, notamment le blind test. Nous organisons aussi un jeu concours (donnant pour l’instant accès à des spectacles en ligne, à l’avenir en présentiel). À terme, nous souhaitons qu’Aria puisse être disponible sur enceintes connectées, et nous travaillons sur une série de podcasts.

Avec quels moyens et quels prestataires avez-vous produit cet outil ?

Caroline Brown : Notre mécène est Huawei, bien qu’il ne soit pas intervenu dans la production de l’outil - il a seulement contribué financièrement au projet. Le Ministère de la Culture a également participé. L’agence Mazarine Digitale, spécialisée dans la communication du luxe et de la culture, et Keyrus, spécialisé en bot de conversation, ont développé Aria. 

Comment le public a-t-il réagi et quels sont les liens entre Aria et l’Opéra lui-même vous fixez-vous ?

Aria puise dans la pop culture pour mener le grand public vers l’Opéra.  - © D.R.
Aria puise dans la pop culture pour mener le grand public vers l’Opéra. - © D.R.

Caroline Brown : À l’origine, le lancement devait avoir lieu en décembre 2019, mais les grèves dans les transports et à l’Opéra rendaient impossibles l’accès aux spectacles, Aria n’aurait donc pas eu de sens à ce moment-là. Le lancement s’est donc fait le 9 avril 2020, pendant le premier confinement. Le public étant « captif » à ce moment-là, la réaction du public a été bien supérieure à ce que nous attendions, le premier mois comptabilisant 80 000 visiteurs, dont plus de la moitié ont interagi avec le bot. 300 000 utilisateurs ont découvert Aria, au cours d’interactions bien plus longues que sur d’autres outils du même type. 

L’objectif d’Aria est avant tout de familiariser un public néophyte à la culture de l’opéra, dans l’idée qu’il ait envie de venir en voir - où que ce soit, pas forcément à l’Opéra de Paris. Nous ne collons pas spécifiquement à l’actualité du lieu, ce que fait déjà le magazine de l’Opéra. Aria ne redirige pas explicitement vers une billetterie, et ne met pas forcément en avant les pièces programmées sur la saison. Il peut être indiqué sur la fiche d’une œuvre « en ce moment à l’Opéra », mais cela n’ira pas plus loin.

Comment le lieu physique traverse-t-il cette période de fermeture prolongée ? 

Gwenola Taithe : Quelques concerts ont pu avoir lieu en présentiel avant le second confinement. Depuis, danseurs, chanteurs, musiciens et techniciens répètent comme à la normale et sont prêts à rejouer dès que cela sera possible. Concernant notre offre de spectacles en ligne, elle a mis du temps à être mise au point, car nous devions respecter les règles du marché public pour choisir nos partenaires. Depuis, Opéra Chez Soi propose une offre mixte payante/gratuite, qui a rencontré un fort succès : nous comptons désormais 530 000 visites, et 640 000 contenus visionnés. La plateforme propose 37 spectacles, et le prix des billets a été fixé à 7,90 euros.