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Théâtres privés : l’ASTP accompagne la sortie de crise

Par Thomas Corlin | Le | Organisations et réseaux professionnels

Et si la pandémie initiait de nouvelles collaborations entre réseau public et privé ? C’est le souhait de l’Association pour le Soutien du Théâtre Privé, qui accompagne de près la sortie de crise, d’après sa déléguée générale Anne-Claire Gourbier.

« Les Filles aux Mains Jaunes » par Johanna Boyé, au Théâtre Rive Gauche (Paris 14e) - © Fabienne Rappeneau
« Les Filles aux Mains Jaunes » par Johanna Boyé, au Théâtre Rive Gauche (Paris 14e) - © Fabienne Rappeneau

Comment s’est soldée cette année de reprise pour les lieux affiliés à l’ASTP ?

Tout comme le circuit subventionné, la filière du privé a été frappée par de grandes difficultés de fréquentation. La reprise s’est faite lentement, par à-coups. Il n’était pas possible pour certains lieux, en mai 2021, de remonter des équipes et de se remettre en état de marche en peu de temps, ainsi il y a eu beaucoup de réouvertures en octobre. À cela s’est ajoutée une saison en dents de scie, où le retour du public n’a pas été aussi rapide qu’espéré. 

À quelle hauteur estimez-vous votre perte de public ?

Nous percevons la taxe sur la billetterie des spectacles et, sur ce premier quadrimestre, nous avons constaté une baisse de l’ordre de 15 à 20 %. Une étude de Médiamétrie révèle par ailleurs que 27 % des 15 ans et plus sont retournés au théâtre depuis le déconfinement - privé et public confondus. Au milieu de tout ça, ce sont les programmations les plus alléchantes qui ont tiré leur épingle du jeu, ce qui n’est pas nouveau. En revanche, qu’importe la jauge, ce sont les théâtres ou les structures de production les plus structurés, avec une fonction de community management performante, qui ont su garder le lien avec leur public, et ainsi connu une reprise satisfaisante. 

Allier les avantages du public et du privé. 

Votre réseau a-t-il connu des défections ?

Pas à notre connaissance, ce qui indique que les aides ont su répondre aux urgences liées à la pandémie. Mais nous ne sommes pas du tout au bout des difficultés. Le public n’est pas vraiment revenu, la conjoncture économique est très complexe, et les recettes de billetterie sont en berne, alors qu’il faut désormais réinvestir pour lancer une saison, c’est peut-être maintenant qu’il faudra se montrer vraiment résistant. 

La pandémie aura-t-elle modifié la façon d’agir de l’ASTP ?

L’association s’est positionnée sur un spectre plus large que sa base habituelle - nous étions auparavant plus parisiens. Elle a été créée en 1964, dans une réalité historique autre. Il est temps désormais de se situer sur tout le territoire et de réaliser que le réseau privé irrigue toutes les régions. Nous avons bel et bien des bénéficiaires sur tout l’Hexagone, et l’urgence a renforcé nos liens. 

Comment accompagnez-vous la baisse des aides d’urgence ?

L’État nous a confié la gestion de 10 M€ pour le plan de relance, et nos actions ont vocation à durer jusqu’à la fin 2022. Nos aides fonctionnent sur deux niveaux : d’un côté sur la production, à savoir les frais de montage, toutes les dépenses antérieures à la première représentation. Il s’agit alors d’une aide proportionnée au nombre d’emplois en plateau. Puis nous soutenons les tournées : la commercialisation des dates est plus complexe qu’avant-crise, et nous compensons ces difficultés par une aide aux salles, sur la base d’un forfait pour chaque date générant une taxe. Ces aides sont à solliciter sur deux plateformes : le FCSVP, et le PASVT. Lorsqu’une structure rentre dans les critères, l’aide est attribuée sans commission. 

Les modèles économiques du privé pourraient-ils être amenés à changer ?

Soyons clairs : les entrepreneurs n’ont pas vocation à être subventionnés, ni l’État ni les intéressés ne seraient d’accord. Pour autant, des passerelles sont à penser, c’est une demande formulée par le Ministère. Des productions hybrides se montent, les résidences s’effectuent dans le public, puis la diffusion se fait dans le public puis le privé, pour toucher plus de publics. Il s’agirait d’allier les avantages du public et du privé. 

Ce n’est pas parce que le privé est une filière économique qu’il faut l’exclure des politiques culturelles. Le théâtre privé est également pourvoyeur de diversité contemporaine, ses lieux sont très présents sur les territoires et participent à la proximité. La plupart des spectacles jouant dans des théâtres de ville viennent du privé. La complémentarité entre les deux réseaux est donc à matérialiser.