Production

Production : le Sinfonia Pop Orchestra, ou l’habile économie d’un orchestre privé

Par Sylvain Chantal | Le | Diffusion, booking

Les nuits sont courtes lorsqu’on se trouve à quelques jours d’envoyer 70 musiciens sur la route. Alors que le spectacle Disney en concert entame une tournée des Zénith le 8 octobre, Flore Commandeur raconte son métier de directrice de production au sein du Sinfonia Pop Orchestra, une formation spécialisée dans les ciné-concerts depuis 2009.

Ciné-concert Disney - © Laurent Bugnet
Ciné-concert Disney - © Laurent Bugnet

C’est le même cœur qu’à la création de la formation en 2009. Il s’agit d’une bande d’amis.

Sur le parking du Zénith de Saint-Herblain, les plaques d’immatriculation sont plurielles en ce soir de printemps. 22, 29, 35, 44, 49, 56, 72, 85, on se presse de tout l’Ouest pour assister à la projection de Gladiator. Et pas seulement afin d’admirer les biscoteaux de Russell Crowe sur écran géant, mais surtout pour écouter les 200 artistes présents sur scène pour illustrer musicalement le film de Ridley Scott. Ce spectacle, produit par G1 Production et orchestré (c’est doublement le cas de le dire) par le Sinfonia Pop Orchestra, est la deuxième collaboration entre les deux structures.

Une expérience qu’ils renouvellent aujourd’hui avec deux nouveaux shows : Disney en concert - Magical music from the movies et Dragon Ball in concert. Le premier entame un marathon de 24 dates au Zénith de Toulon le 8 octobre 2022. Le second débute une tournée de 20 dates le 25 janvier 2023 au Palais des Sports de Paris. « Le Sinfonia Pop Orchestra est prestataire et non producteur de ces spectacles. C’est Guillaume Gein, directeur de G1 Production, qui assume les risques financiers. Il a fait appel à nous pour constituer l’orchestre sur scène. Mais notre rôle dépasse le simple fait de gérer une formation. Nous assurons toute la supervision artistique des concerts. Nous nous dépensons sans compter car monter de beaux spectacles est ce qui nous tient le plus à cœur », explique Flore Commandeur, la directrice de production du SPO.

« J’ai d’abord connu le SPO en tant que violoniste »

 Flore Commandeur - © D.R.
Flore Commandeur - © D.R.

C’est d’abord comme violoniste qu’elle a rejoint l’entité en 2014 car la diplômée d’HEC est aussi une musicienne confirmée. « C’est le même cœur qu’à la création de la formation en 2009. Il s’agit d’une bande d’amis. Tout le monde est témoin de mariage des uns des autres. J’ai d’abord connu le SPO en tant que violoniste. Puis un jour, alors que je commençais à travailler dans la musique de film, j’ai eu besoin de musiciens pour un projet. J’ai alors pensé à cet orchestre et c’est ainsi que j’ai commencé à développer l’activité du SPO. » Depuis 2017, elle est directrice associée de la structure, au côté de Jean-Philippe Fournier, directeur général et artistique, et de Constantin Rouits, directeur musical.

« 500 musiciens à recruter à l’automne 2023 »

Pour le spectacle des 100 ans de la Walt Disney Company, programmé à l’automne 2023 avec deux dates à l’U Arena à Paris, puis 15 dates en province, Flore Commandeur est montée d’un cran en matière de challenge. Ce ne sont plus 200 musiciens qu’elle devra recruter, mais 500 ! De fait, elle a convoqué sa sœur Cloé, elle aussi musicienne, pour lui déléguer notamment la partie logistique qu’elle administrait jusque-là. « C’est un aspect du travail qui prend un temps monstrueux. D’autant que nous essayons d’assurer le meilleur confort possible aux musiciens. Quand on a 25 ans, comme lorsque le Sinfonia a commencé, on accepte de dormir dans une chambre twin. Quand on en a dix de plus, c’est moins évident. Or l’humeur s’en ressent lorsqu’on est bien logé ou que le catering est bon ; le spectacle n’en est que meilleur. Nous devons jongler avec ces paramètres, car tous ces coûts sont répercutés sur la production. » Le Sinfonia Pop Orchestra est en effet une structure privée qui représente, pour un producteur, un coût supérieur à celui des formations subventionnées.

« Nous ne cherchons pas à nous aligner avec les orchestres nationaux »

Sur les tournées, notre économie repose en partie sur le fait que nous amortissons le coût des répétitions sur une importante série de dates.

Pendant la tournée Gladiator, G1 Productions a notamment employé un orchestre national sur deux dates : l’Orchestre philharmonique de Strasbourg. « Nous savons que nous coûtons plus cher que les orchestres nationaux et nous ne cherchons d’ailleurs pas à nous aligner en matière budgétaire, ce serait impossible ! En revanche, nous présentons l’avantage d’être plus souples que les orchestres constitués qui ont des règles strictes vis-à-vis de leurs musiciens et qui ont des saisons établies longtemps à l’avance. Par exemple, lorsqu’un orchestre national se déplace, il faut souvent faire arriver les musiciens la veille d’un concert car ils n’ont pas le droit d’effectuer dans la même journée un déplacement, une répétition générale et un concert. Ce qui veut donc dire payer une nuit d’hôtel supplémentaire aux musiciens, des défraiements pour les repas, etc. Sans abuser vis-à-vis de nos musiciens, nous ne sommes pas soumis à ces règlementations strictes et essayons donc de trouver le meilleur équilibre entre confort et respect des artistes d’un côté et maîtrise des coûts de l’autre. Cela dit, quand j’endosse mon costume de productrice pour des musiques de film, activité que j’exerce en parallèle du SPO, je suis amenée à travailler avec ces orchestres nationaux et je suis ravie de pouvoir le faire car je devrais sinon chercher des solutions à plus bas coûts, comme le proposent les pays de l’Est par exemple ! Mais, sur les tournées, notre économie repose en partie sur le fait que nous amortissons le coût des répétitions sur une importante série de dates. »

Il en va de même pour le producteur pour qui il est vital que la tournée soit conséquente, le coût diminuant en effet en fonction du nombre de dates. 

« Nous sommes en confiance avec Disney »

 Ciné-concert Disney - © Laurent Bugnet
Ciné-concert Disney - © Laurent Bugnet

Sur la tournée Disney, Flore Commandeur sera bien sûr présente dans la salle, mais avec une autre casquette que celle de directrice de production. En régie, elle donnera les tops vidéo. « Pour ce poste, il faut obligatoirement quelqu’un qui soit musicien et qui sache lire les partitions. D’autant que notre spectacle est interactif. Les images à l’écran changent tout le temps et j’en connais le déroulé par cœur. Le Sinfonia Pop Orchestra a déjà travaillé avec les gens de Disney sur un précédent spectacle et nous avons pu leur suggérer des idées. Nous sommes en confiance avec eux et pouvons nous permettre d’être force de proposition artistique. C’est avec l’équipe française de Disney que nous avons travaillé, puis cela a été validé par les Américains. Nous venons d’ailleurs de recevoir les dernières partitions à seulement quelques jours de la première dijonnaise… » Une autre preuve de la souplesse du Sinfonia Pop Orchestra qui, après la souris aux grandes oreilles, s’attaquera à une autre idole des enfants : le héros bizarrement coiffé de Dragon Ball.

Sinfonia Pop Orchestra

• Plus de 80 concerts depuis sa création en 2010

• 44 concerts sur la saison 2022-2023

• Base de données de plus de 500 artistes 

• Mission : gestion artistique globale des spectacles